RUBRIQUE : DROIT DES SOCIETES
La modification de la répartition des droits à dividendes futurs ne constitue pas une donation indirecte entre associés
Les dividendes n’ayant d’existence juridique qu’une fois l’existence de sommes distribuables constatée et leurs mises en distribution décidée par l’organe compétent de la société, la modification de la répartition des droits à dividendes ne constitue pas une donation indirecte entre associés.
Si l’article 1844-1 du Code Civil prévoit une répartition des droits des associés dans les bénéfices de la société à proportion de leurs apports respectifs, il convient de rappeler qu’il peut être librement dérogé à cette règle (sous réserve de clauses léonines interdites conduisant à priver certains d’entre eux de tout droit à dividendes). Quelle que soit la forme de la société, une répartition différente des droits à dividendes peut ainsi être stipulée dans les statuts, dans un pacte ou peut encore être décidée en cours de vie sociale par une décision collective (sans nécessairement avoir recours, dans les sociétés par actions, à la création d’actions de préférence).
En l’espèce, par décision collective prise à l’unanimité des associés, les droits à dividendes statutaires des parents usufruitiers des parts d’une société civile avaient été réduits au profit de leurs deux enfants, nus propriétaires, pour une durée temporaire de 5 ans. L’administration fiscale entendait soumettre aux droits de mutation à titre gratuit le supplément de dividendes perçus par les enfants sur la base de cette nouvelle répartition.
La Cour de Cassation (Cass. Com., 18 décembre 2012, Godefroy,n° 11-27.745) juge entre autres motifs qu’il n’y a pas de donation indirecte dès lors qu’à l’instant de la décision de modification de la répartition des droits sur les dividendes, les associés n’avaient aucun droit sur ceux-ci, les dividendes n’ayant d’existence juridique qu’une fois l’existence de sommes distribuables constatée et leurs mises en distribution décidée par l’organe compétent de la société.
Les dividendes n’ayant pas d’existence juridique, l’objet même de la donation fait défaut.
De par sa motivation, cette décision va au-delà du seul cas d’espèce du démembrement des titres de société et donne sa pleine efficacité à la liberté laissée par la loi aux associés pour définir les bases de répartition entre eux des fruits de l’activité sociale, autrement qu’au seul prorata de leurs apports.